La puissante écriture intertextuelle de Marie Darrieussecq dans Il faut beaucoup aimer les hommes

Auteurs-es

  • Catherine Rodgers Swansea University

Résumé

En 2010 Marie Darrieussecq publiait Rapport de Police, Accusations de plagiat et autres modes de surveillance de la fiction comme réponse aux accusations de plagiat portées contre elle par Camille Laurens et Marie NDiaye. Dans cet essai elle se réclamait d‘une écriture franchement intertextuelle. Il faut beaucoup aimer les hommes appartient à  ce modèle d‘écriture : Darrieussecq puise dans d‘autres textes des images fortes pour les renouveler et les prolonger. En particulier, elle y retravaille certains topoï, tels le coup de foudre, la passion hétérosexuelle et les relations Blancs-Noirs. Ses principaux intertextes sont Passion simple d‘Annie Ernaux, Heart of Darkness de Joseph Conrad ainsi qu‘Apocalypse Now, le film qu‘en a tiré Francis Ford Coppola. Elle met aussi à  son service plusieurs textes de Marguerite Duras, ainsi que des chansons, des proverbes, des phrases clés et des anecdotes. Elle explore ainsi de nombreux clichés, entre autres ceux qui concernent deux lieux mythiques, Hollywood et l‘Afrique.

Cette riche intertextualité aurait pu amener la dilution de sa propre voix si elle n‘avait pas aussi ancré son texte dans sa propre expérience, en incluant la présence discrète d‘un je auctorial et en s‘assurant par un épitexte extensif que les rapprochements autobiographiques avec sa protagoniste Solange soient connus ainsi que le fait que son texte est aussi né de recherches personnelles sur l‘Afrique et Hollywood. Avec Il faut beaucoup aimer les hommes, Darrieussecq a ainsi écrit un texte puissant et personnel malgré, ou plutôt grâce à , sa vaste intertextualité. In 2010 Marie Darrieussecq published Rapport de Police, Accusations de plagiat et autres modes de surveillance de la fiction as a response to the accusations of plagiarism brought against her by Camille Laurens and Marie NDiaye. In this essay she claims her right to an openly intertextual writing. Il faut beaucoup aimer les hommes belongs to this type of writing: Darrieussecq draws strong images from other texts to renew and extend them. In particular, she reworks certain topoi, such as love at first sight, heterosexual passion, and White-Black relations. Her main intertexts are Passion simple by Annie Ernaux, Heart of Darkness by Joseph Conrad and Apocalypse Now, the film that Francis Ford Coppola made from it. She also uses several texts by Marguerite Duras, as well as songs, proverbs, key sentences, and anecdotes. She thus explores many clichés, including those relating to two legendary places, Hollywood and Africa. This rich intertextuality could have led to the dilution of her own voice if she had not also anchored her text in her own experience, by including the discreet presence of an auctorial I, and by ensuring through a large epitext that the autobiographical comparisons with its protagonist Solange are known as well as the fact that her text was also born from personal research on Africa and Hollywood. With Il faut beaucoup aimer les hommes, Darrieussecq has written a powerful and personal text despite, or rather thanks to, its vast intertextuality.

Biographie de l'auteur-e

Catherine Rodgers, Swansea University

Catherine Rodgers est Honorary Research Associate dans le « Department of Modern Languages, Translation and Interpreting » à  Swansea University (UK). Ses recherches portent sur les écrivaines françaises. En plus de divers articles sur Marguerite Duras, Simone de Beauvoir, Carol Bernstein, Paule Constant, Marie Darrieussecq, Anne-Marie Garat, Camille Laurens, Lorette Nobécourt, Amélie Nothomb et Nathalie Rheims, elle a co-édité une collection d‘essais Marguerite Duras : Lectures plurielles (Rodopi, 1998), édité une collection d‘interviews réalisées avec des féministes françaises Le Deuxième Sexe : un héritage admiré et contesté (L‘Harmattan, 1998) et co-édité une collection d‘essais sur la nouvelle génération d‘écrivaines françaises Nouvelles Écrivaines : nouvelles voix ? (Rodopi, 2002). Elle a co-organisé le colloque de Cerisy en 2014 sur Marguerite Duras, et en a co-édité les actes (Marguerite Duras : passages, croisements, rencontres, Classiques Garnier, 2019). Elle vient de publier une collection d‘essais Descendances durassiennes, écritures contemporaines, (Passage(s), 2020). Elle a co-fondé la Société internationale Marguerite Duras en 1997, en a été la co-vice-présidente et co-éditrice de son Bulletin jusqu‘en 2017.

Publié-e

2022-02-02