La biographie comme atelier commun. À propos d'Être ici est une splendeur de Marie Darrieussecq

Auteurs-es

  • Olivier Hambursin Université Saint-Louis – Bruxelles

Résumé

Oeuvre à  part dans la production de Marie Darrieussecq, Être ici est une splendeur (paru en 2016) constitue, à  ce jour, la seule « biographie » écrite par l‘auteur. Elle retrace la courte vie d‘une peintre, Paula M. Becker, qui vécut en Allemagne de 1876 à  1907 et dont l‘oeuvre, à  l‘époque de la parution du livre, était encore largement méconnue en France. Si ce texte s‘inscrit bien entendu dans un vaste et large mouvement de la littérature contemporaine – on le sait, « nombre de romanciers actuels s‘affrontent à  cet objet précaire qu‘est le récit de vie » et en font un genre littéraire « majeur dans le paysage éditorial » (Tadié & Cerquiglini, 339-340) –, il se démarque, nous semble-t-il, par les différents niveaux de lecture qu‘il propose. L‘examen des éléments retenus de la vie de Paula Becker, des mots choisis, de la construction du texte permet de montrer qu‘Être ici est une splendeur constitue aussi, pour l‘écrivaine, une occasion de creuser certains des sillons tracés dans ses oeuvres romanesques antérieures, comme l‘engagement féministe, l‘importance des voyages et de la géographie, la question de la mort et de la trace, faisant ainsi de certains aspects de la biographie des miroirs. Mais ce récit se révèle aussi, et peut-être surtout, un passionnant atelier où se travaillent les grandes questions de ce genre polymorphe qu‘est la biographie à  l‘époque contemporaine. Telles sont les voies que cet article entend explorer.

Standing apart from the rest of Marie Darrieussecq‘s work, Being Here is Everything (2016) is, to date, the only ‘biography‘ written by this author. It recounts the short life of a German painter, Paula M. Becker (1876 - 1907), whose work was largely unknown in France when this book was published. This text takes its place within a very broad contemporary literary movement – as everyone knows, ‘a fair number of today‘s novelists grapple with that uncertain and unstable construct which is the story of a life‘ and make it into a major ‘literary genre in the publishing landscape‘ (Tadié & Cerquiglini, 339-340). Yet it stands out, in our view, thanks to the different possible levels of reading that it offers. Studying the details of Paula Becker‘s life that are selected here, the words chosen and the construction of the text, makes it possible to show that Being Here is Everything also constitutes for the author an opportunity to dig down into themes and topics previously addressed in her fiction, such as feminism, the importance of travelling and of geography, the question of death and what remains after death, thus, as it were, turning certain features of this biography into mirrors.  But this story also turns out to be - perhaps more than anything else - a fascinating locus of interrogation and reflection where the great questions arising in the polymorphous genre that is contemporary biography are worked through. It is such avenues that this article sets out to explore.

Biographie de l'auteur-e

Olivier Hambursin, Université Saint-Louis – Bruxelles

Chercheur au Fonds national de la recherche scientifique (FNRS) à l‘Université catholique de Louvain (UCLouvain) de 1996 à 2003, Olivier Hambursin est actuellement professeur à l‘Université Saint-Louis (Bruxelles), au sein de la Faculté de traduction et d‘interprétation. Auteur d‘une thèse de doctorat sur l‘oeuvre de l‘écrivain romand Nicolas Bouvier, il publie articles et livres sur la littérature française contemporaine et sur la littérature voyageuse. Quelques titres parmi d‘autres : « Le récit de voyage en question. L‘Usage du monde de Nicolas Bouvier à  la croisée des genres » (Roman 20-50 : revue d'étude du roman du XXe siècle, 2018, 8, 135-149), « Le roman en écho. Quand Vincent Almendros dialogue avec Maupassant » (@nalyses, 2017, 12.2, 253-276); « Fin de partie au Mali. Oreille rouge d‘Eéric Chevillard » (Les Lettres romanes, 2016, 70, 47-67), « Le lexique et le traducteur. Quelques réflexions sur l‘enseignement du lexique en langue maternelle française pour la formation des traducteurs/interprètes » (Le Langage et l‘Homme, 2013, 48.2, 71-85), « Quand la lenteur du voyage mène à la profondeur » (in Voyages contemporains. Textes réunis et présentés par Ph. Antoine, Paris : Minard, 2010, 83-93), « Littérature de voyage et excentricité au XXe siècle : Ecuador de Michaux » (Dalhousie French Studies, 2006, 74-75, 185-198), Récits du dernier siècle des voyages. De Victor Segalen à Nicolas Bouvier (Paris : Presses de l‘Université Paris Sorbonne, 2005, 262 p.), Voyage et littérature. Sens et plaisirs de l‘écriture pérégrine (L‘Arbre à Paroles, 2002, 385 p.).

Publié-e

2022-02-02